Reconnaître une intelligence artificielle comme un inventeur et protéger ses « inventions » par le brevet est un dilemme qui remet en cause le fondement de la propriété intellectuelle et industrielle.
Stephen Thaler est un scientifique de l’Université de Missouri aux Etats-Unis. Il a soumis des demandes de brevet pour un nouveau de type de packaging agroalimentaire qui conserverait mieux la chaleur avec une manipulation simple. Sauf que ce n’est pas Stephen Thaler qui est identifié comme inventeur mais une machine appelée DABUS. DABUS pour Device for the Autonomous Bootstrapping of Unified Sentence est un système d’intelligence artificielle. Il est même précisé sur la demande que « l’invention a été automatiquement générée par une intelligence artificielle« .
L’Afrique du sud et l’Australie ont répondu favorablement à la requête, reconnaissant DABUS comme un inventeur. Les autres pays où la demande a été également faite n’ont pas reconnu le brevet. Parmi ces pays, il y a Taïwan dont l’Office de la propriété intellectuelle a rejeté la demande déposée par Stephen Thaler.
« Un inventeur doit être un être humain »
Tribunal de commerce et de la propriété intellectuelle de Taïwan
Pour l’Office taïwanais, une intelligence artificielle ne peut être considéré comme un inventeur car la loi taïwanaise ne reconnait cette qualité qu’à un être humain. Position partagée par le Tribunal du commerce et de la propriété intellectuelle.
Stephen Thaler a toutefois relevé une forme de contraction dans la loi taïwanaise. Le droit d’auteur taïwanais protège les personnes morales. Le droit des brevets, quant à lui, ne protège pas les personnes morales. Cependant les dessins et modèles sont protégés par la loi sur les brevets et peuvent également être protégés par le droit d’auteur. Une situation qui pousse les conseils de Monsieur Thaler à se demander pourquoi reconnaître les créateurs non humains et méconnaître les inventeurs non humains.
Le Tribunal de commerce et de la propriété intellectuelle a formé son argumentaire sur deux points. Premièrement, le tribunal se fonde sur les directives d’examen de brevet qui exigent qu’un inventeur soit une personne physique. Deuxièmement, le tribunal rappelle la volonté du législateur taïwanais d’encourager et protéger les fruits de l’activité mentale humaine. Pour répondre à la question sur la contradiction soulevée par la partie Thaler, le tribunal répond que l’IA n’est pas une personne morale.
L’intelligence artificielle prend de plus en plus une grande proportion dans la société. Toutefois le régime de sa protection reste encore une question ouverte. L’évidence est que la technologie n’attend pas le droit pour évoluer.