L’affaire SAS Institute Inc. / World Programming est un cas classique à étudier pour tout spécialiste qui s’intéresse au droit du logiciel. Il y a déjà beaucoup d’études faites sur cette affaire. L’objectif de cet article, cependant, n’est pas l’interprétation de l’arret, mais l’introduction des principales questions abordées dans cette affaire.

SAS Institute Inc., dont le nom a été formé à partir de « Statistical Analysis System », est un éditeur de logiciels spécialisé en informatique décisionnelle. SAS Institute est une société qui développe des logiciels analytiques. Elle a, sur une période de 35 ans, développé un ensemble intégré de programmes d’ordinateur qui permet aux utilisateurs d’effectuer un large éventail de travaux de traitement et d’analyse de données, notamment des analyses statistiques. Le composant essentiel du système SAS, appelé «Base SAS», permet aux utilisateurs d’écrire et de passer leurs propres programmes d’application en vue d’adapter le système SAS pour qu’il traite leurs données (scripts). Ces scripts sont écrits dans un langage propre au système SAS.

World Programming Limited (WPL) a estimé qu’il existait un marché potentiel pour des logiciels de substitution capables d’exécuter des programmes d’application écrits dans le langage SAS. WPL a dès lors créé le «World Programming System», conçu pour émuler aussi étroitement que possible la fonctionnalité des composants SAS, en ce sens que, mis à part quelques exceptions mineures, elle a tenté de s’assurer que les mêmes inputs produiraient les mêmes outputs. Cela permettrait aux utilisateurs du système SAS de faire tourner sous le «World Programming System» les scripts qu’ils ont développés pour être utilisés avec le système SAS. Լa société WPL n’avait pas eu recours à un procédé de décompilation du code objet, et ne disposait donc pas du code source. Elle étudiait juste le fonctionnement du système SAS et  analysait les principes et idées.

La Cour de justice de l’Union européenne, ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume-Uni), par décision du 2 août 2010, parvenue à la Cour le 11 août 2010, dans la procédure SAS Institute Inc., contre World Programming Ltd, ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 29 novembre 2011, a  rendu  l’arret le 2 mai 2012. Les affirmations principales de la cour de justice de l’Union européenne étaient les suivantes :

1․ (…) L’article 1er, paragraphe 2, de l la directive 91/250 doit être interprété en ce sens que ni la fonctionnalité d’un programme d’ordinateur ni le langage de programmation et le format de fichiers de données utilisés dans le cadre d’un programme d’ordinateur pour exploiter certaines de ses fonctions ne constituent une forme d’expression de ce programme et ne sont, à ce titre, protégés par le droit d’auteur sur les programmes d’ordinateur au sens de cette directive.
2․(…) l’article 5, paragraphe 3, de la directive 91/250 doit être interprété en ce sens que la personne ayant obtenu une copie sous licence d’un programme d’ordinateur peut, sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur, observer, étudier ou tester le fonctionnement de ce programme afin de déterminer les idées et les principes qui sont à la base de n’importe quel élément dudit programme, lorsqu’elle effectue des opérations couvertes par cette licence ainsi que des opérations de chargement et de déroulement nécessaires à l’utilisation du programme d’ordinateur et à condition qu’elle ne porte pas atteinte aux droits exclusifs du titulaire du droit d’auteur sur ce programme.
3․ (…) Le titulaire du droit d’auteur sur un programme d’ordinateur ne peut empêcher, en invoquant le contrat de licence, que la personne ayant obtenu cette licence détermine les idées et les principes à la base de tous les éléments de ce programme lorsqu’elle réalise les opérations que ladite licence lui permet d’accomplir ainsi que les opérations de chargement et de déroulement nécessaires à l’utilisation du programme d’ordinateur et à condition qu’elle ne porte pas atteinte aux droits exclusifs de ce titulaire sur ce programme.
4․ Au sens de la directive de 2001, la reproduction dans un programme d’ordinateur ou dans un manuel d’utilisation de ce programme d’ordinateur, de certains éléments décrits dans le manuel d’utilisation d’un autre programme protégé par le droit d’auteur est susceptible de constituer une violation du droit d’auteur sur ce dernier manuel si cette reproduction constitue l’expression de la création intellectuelle propre à l’auteur du manuel d’utilisation du programme d’ordinateur protégé par le droit d’auteur.

Comme deja indiqué, ce sont les affirmations principales dans l’arret. Cependant, compte tenu notamment de l’importance de l’affaire, toutes les personnes intéressées sont invitées à lire le texte intégral ici : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:62010CJ0406&from=FR․ 

Rédigé par SHAHINYAN Lilit

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