Une intelligence artificielle ne peut être mentionnée comme inventeur lors du dépôt d’une demande de brevet. Cette solution a été mise en avant tant par l’office américain que par l’Office Européen des Brevets (ci-après OEB) concernant une « intelligence artificielle connexionniste » nommée DABUS.

La position de l’USPTO

L’office américain des brevets (US Patent and Trademark Office, ci-après USPTO) a rejeté deux demandes de brevet désignant en tant qu’inventeur une intelligence artificielle. La question qui s’est posée était alors de savoir si ces intelligences artificielles pouvaient avoir la qualité de créateur d’invention, ou si celle-ci était réservée aux seules personnes humaines.

Déjà établie par la législation américaine sur les brevets, seul un individu peut être, lors d’une demande d’enregistrement devant l’office, désigné comme inventeur. L’USPTO parle de « natural person ». Cependant l’IA se développe dans de nombreux domaines industriels comme outil d’aide à l’activité inventive et à la découverte d’innovation ; au point de mettre à jour par elles-mêmes des inventions protégeables par le droit des brevets. Cela conduit des entreprises, souhaitant mettre en avant la performance de leur intelligence artificielle, à revendiquer à ces dernières le titre d’inventeur.

En l’espèce un même programme d’ordinateur nommé DABUS (signifiant « device for the autonomous bootstrapping of unified sentience ») a permis la création d’une lampe torche d’urgence produisant un dispositif particulier permettant de mieux être détecté par des secours d’une part, et un récipient alimentaire que les robots peuvent aisément saisir d’autre part. Le créateur de DABUS, Stephen Thaler, se met en retrait de la mise au point de ces solutions techniques, au profit du rôle central de son intelligence artificielle. Invoquant ne pas avoir de connaissances spécifiques aux deux inventions créées par sa machine, il ne saurait être légitimement un inventeur.

Un refus similaire en Europe

La position de l’USPTO intervient quelques mois après celle de l’Office européen des brevets (en charge des demandes européennes) qui avait déjà rejeté les mêmes demandes dans l’Union Européenne, lors d’une procédure orale en novembre 2019.

Se fondant sur l’article 81 de la Convention de Munich de 1973 sur le brevet européen, qui exige que soit désigné la mention de l’inventeur, l’office rappelle que cette qualité implique nécessairement qu’il soit une personne physique. Ainsi, ces deux demandes de brevets (EP 18 275 163 et EP 18 275 174) n’ont pas été rejetées pour des défauts tenant aux exigences de fond (l’invention doit être nouvelle, ne pas être exclue des domaines de la brevetabilité, impliquer une activité inventive, et être susceptible d’application industrielle), mais pour un élément de forme qui ne leur avait jusqu’alors jamais été présenté.

Un inventeur est donc forcément, comme le suggéraient implicitement les textes européens et nationaux, une personne physique. Si cette solution semble évidente, elle ajoute une pierre à l’édifice que d’aucuns souhaitent bâtir de voir émerger un réel droit des intelligences artificielles, allant parfois jusqu’à leur envisager une personnalité juridique.

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