Depuis quelques années, la reconnaissance faciale fait débat en France et est encore régulièrement mise en avant par les pouvoirs publics comme instrument de sécurité. Mais de quoi s’agit-il vraiment ? La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), autorité de contrôle en matière de protection des données à caractère personnel, a défini dans une notice explicative en date du 15 novembre 2019, cette notion comme une technologie qui permet d’authentifier et identifier une personne physique à partir des traits de son visage. Ces derniers sont des données biométriques et font l’objet d’une protection particulière par le Règlement général de la protection des données (RGPD) et la loi Informatique et Libertés (LIL).

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Les expérimentations de la reconnaissance faciale en France

En 2019, par exemple, la ville de Nice a expérimenté la reconnaissance faciale sur des volontaires lors de son carnaval à titre de test d’identification de rue et la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) a voulu l’instaurer à l’entrée de plusieurs lycées. La CNIL, saisie d’une demande de conseil par la Région PACA, a fait connaître son opposition à ce projet, par un communiqué publié sur son site internet le 29 octobre 2019.

Mais ce qui a surtout relancé ce débat houleux a été l’annonce du projet de la fameuse application ALICEM en mai 2019 qui a fait beaucoup de bruit. En effet, pour pouvoir se connecter et accéder aux services publics en ligne qu’elle propose, l’application ALICEM ne laisse pas d’autre choix au citoyen que d’utiliser la reconnaissance faciale lors de son inscription. C’est donc sans surprise que cette application a fait réagir la CNIL. 

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Le débat autour de la reconnaissance faciale en France

La société se divise sur cette problématique : certains voient un intérêt à cette technologie alors que d’autres y perçoivent surtout les risques et dangers qu’elle fait courir aux individus.

Pour les adeptes du développement de la reconnaissance faciale dans notre pays, ils y voient surtout un potentiel en matière de sécurité. En effet, grâce à cette technologie biométrique, il serait plus aisé de localiser des délinquants et criminels, de repérer les individus qui ont un comportement suspect ou encore de prévenir certains mouvements de foule. Aussi, sur le long terme, certains avancent que cela pourrait être utile lors des Jeux Olympiques de Paris en 2024 ou encore en matière de terrorisme. 

Pour ceux qui sont hostiles à la généralisation du système de reconnaissance faciale en France, en revanche, bien d’autres arguments sont mis sur la table. La crainte la plus fréquemment invoquée est, sans nul doute, la violation du respect à la vie privée des individus. En effet, lorsque l’on sait que plus d’un million de caméras de surveillance sont installées et en exploitation sur notre territoire, il est légitime de s’inquiéter quant à leur potentielle utilisation en association avec des outils de reconnaissance faciale. Dès lors, l’annonce du gouvernement français en décembre dernier de vouloir expérimenter la reconnaissance faciale via la vidéosurveillance dans l’espace public ne leur a pas fait plaisir ! Les réfractaires craignent en effet la surveillance massive des citoyens et les potentielles dérives afférentes. 

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La peur d’une ressemblance de plus en plus forte avec le système chinois

Une autre grande inquiétude, pour les défenseurs de la vie privée et des libertés, serait qu’une telle expérimentation, si elle devait effectivement être mise en œuvre, aboutisse à une omniprésence de la reconnaissance faciale à l’instar de ce qui existe déjà en Chine. En effet, qui aurait imaginé il y a quelques années encore que certains individus ne puissent pas entrer au zoo, tel que celui de Hangzhou, sans passer par un système de reconnaissance faciale ? Rapporté à la France, qui, dans notre société, souhaiterait réellement faire l’objet d’un système de notation via cette technologie, tel qu’il est mis en place en Chine, et perdre « des points » en plus d’être humilié lorsqu’il ne traverse pas une rue sur un passage piéton et lorsque le feu est au vert pour les piétons ?

Ce débat délicat est loin d’être fini… Avec l’exemple de l’expérimentation de la reconnaissance faciale dans le stade du club de football professionnel de Metz en début d’année, on ne peut pas dire le contraire. A suivre !


Publié le 14 Février 2020 par Amandine Leleu

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Sources

Notice explicative de la CNIL, 15 novembre 2019

Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD)

Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (LIL)

Communiqué de la CNIL sur l’expérimentation de la reconnaissance faciale dans des lycées, 29 octobre 2019

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